Que vaut donc une vie ? Un soupçon, un homme, suspecté peut-être légitimement mais surtout déjà classé comme probable coupable, des uniformes et une violence autorisée… Sur la balance des consciences, cela se résume à l’équilibre éternellement instable entre loi et ordre d’une part et respect de tout homme qui qu’il soit, de l’autre, finalement une affaire de responsabilité. Et tout à coup, dans nos villes rassurées et prospères, les rues s’embrasent, tout ce qui avait été patiemment construit s’envole dans les flammes avec son accompagnement d’antisémitisme, qui apparaît si facilement en temps d’émeutes, révélant un fond inquiétant. Plus encore, cela semble de nature à s’exporter, le sentiment d’injustice n’existe-t-il pas partout dans un monde où tout s’échange et se transmet sauf, sans doute, le sens de la noblesse humaine ?

Quelle place pour un honnête homme au milieu du cycle hélas si classique des manifestations/destructions et de la répression, les premières entraînant la deuxième qui suscite à nouveau les premières et ainsi de suite ? Jusqu’à la nausée. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Nausée devant la violence d’un ordre qui devient facteur de désordre, nausée devant l’irréparable mort d’un homme, nausée devant ces maisons ou ces boutiques pillées et incendiées, nausée devant un modèle dont on ne veut pas voir le dévoiement ni la nécessité de le changer. Et si on se reprenait à écouter l’antique musique, celle qui parle de compréhension et d’amour du prochain ? Cette petite musique, venue du Ciel et enseignée au peuple juif,  qui dit que l’autre est aussi proche de soi qu’une partie de soi-même et que c’est seulement ensemble que nous saurons répondre aux difficultés des temps.