On ne peut parler de rien d’autre que de retraite en ce moment semble-t-il. Entre « défense des avantages acquis », pérennité des systèmes de garantie sociale, régime général et régimes spéciaux, le sujet n’a sans doute jamais fait autant la « une » de l’actualité. Et pourtant si, au-delà des débats en cours, aussi légitimes et nécessaires qu’ils soient, on avait omis de s’interroger sur le concept même de retraite ? Cela ne conditionne bien sûr en rien les réformes proposées et ne débouche pas sur une conclusion définitive les concernant. Cependant, ne pas réfléchir au sens de la retraite, c’est écarter un pan de ce qu’est l’être humain.
De fait, le mot « retraite » possède un élément de sens inquiétant. Il implique la notion de « retrait ». On est en droit de se demander de quoi, justement, on se retire voire on est retiré par la volonté du corps social. La première réponse serait sans doute : de l’obligation de travailler. Mais n’est-ce pas aussi de l’ensemble de la société qu’on est ainsi écarté comme si on n’avait plus guère d’utilité, comme si on ne pouvait plus rien apporter de constructif puisqu’on est devenu « retraité » ?
Mais la vie de l’homme a d’abord pour but de multiplier le Bien dans le monde, ce faisant de le raffiner et l’élever. Qui pourrait dire que cela doit s’arrêter un jour. Certes, l’âge avançant, chacun constate que les forces déclinent. Mais cela n’est que la marque d’un passage inéluctable du temps, la vie comme elle suit les pages du calendrier. Il existe une autre manière de compter : à l’aune de la capacité et de la volonté d’agir. Et cette référence-là ignore tout simplement la retraite puisqu’elle ne perçoit que l’investissement personnel dans tous les domaines importants. Sachons, avec le judaïsme, le dire à la norme sociale : quel que soit le système retenu et l’attente des âges fatidiques, la conscience et la raison ne peuvent accepter l’exclusion des anciens.