Depuis une semaine, en Israël et par ricochet dans le monde entier, les communautés religieuses vivent dans la tourmente suite aux révélations d’abus et du suicide qui a suivi, d’un des plus grands écrivains religieux pour enfants qui plus est, était thérapeute auprès des familles…

Plusieurs sommités religieuses internationales se sont exprimées, d’une part pour exprimer leurs soutien aux victimes et d’autre part pour appeler à ne pas hésiter à dénoncer les criminels, comme l’a clamé Rav Yossi Jacobson « dénoncer les violeurs et agresseurs ce n’est pas du Lachon Hara, c’est sauver des vies ! »

Mais pas suffisamment semble-t-il, puisque malheureusement ce discours n’est pas unanime. Certains responsables communautaires en Israël ou en France préfèrent passer ces affaires sous silence. Cela prend souvent des formes de fausses prudences dont la tonalité serait « Il faut certes dénoncer mais il faut faire très attention, cela doit se faire dans un cadre très défini, laissons aux Rabanim le soin de s’en occuper… ». Il n’est pas question de souhaiter une espèce de MeToo au sein du monde orthodoxe ; la condamnation par la médiatisation, qui s’est avérée parfois fallacieuse, est un des plus grands dangers de notre époque – sans contester que cela soit hélas parfois le seul moyen de faire entendre la voix des victimes. Il est en revanche tout à fait naturel de dénoncer publiquement un danger si on veut éviter d’autres drames même au détriment de la ‘’renommé’’ de la personne dangereuse. Nous viendrait-il à l’idée de ne pas dénoncer ou crier au danger si nous étions témoins d’un tueur qui approcherait, pour ne pas le ‘’cataloguer’’ ou nuire à sa famille !?

Nous aurions tort de ne pas saisir ce moment pour clamer haut et fort aux victimes du passé, du présent et de demain : nous sommes à vos côtés, nous vous croyons et peu importe les circonstances, peu importe que vous n’ayez rien dit au moment des faits VOUS N’ETES PAS RESPONSABLES ! Ni des abus, ni de ce qui se passera si vous parlez lorsque vous aurez besoin d’en parler, de vous libérer… L’agresseur est l’unique responsable.

Si ce discours avait été tenu par les nombreuses personnalités qui ont exprimé leur soutien à la famille ou ont fait l’éloge de l’agresseur, au moins une vie aurait été épargnée, celle de Shifra Yoheved Horowitzע”ה . Shifra, une des nombreuses victimes n’a pas supporté moralement, le soutien de tant  de personnalités au côté de son agresseur et a mis fin à ses jours.

Ce drame ne doit pas nous laisser indifférent !

Le geste désespéré de Shifra est le cri silencieux et assourdissant des victimes. Ce cri dérangeant qui vient bouleverser nos convictions, que nous préférons taire pour ne pas perturber notre confort et notre illusion de paix sociale.

La disparition de Shifra ע”ה ne peut rester sous silence, elle doit nous interpeller, elle doit nous aider à changer notre façon d’appréhender ces sujets, de briser ces tabous. Elle doit libérer la parole des enfants, des adolescents et de toutes les victimes, elle doit faire que la honte change de camp !

Lorsque les frères de Yossef se désolèrent de l’erreur qu’ils avaient commis envers ce dernier, Reouven leur dit ‘’ne vous avais-je pas dit: ne fautez pas envers l’enfant ?’’

Le Rabbi explique que Reouven n’était pas en train de remuer le couteau dans la plaie, ce n’était pas un simple ‘’je vous avais dit’’, le sens de sa remarque est plus profond. Il leur dit, ‘’ne vous morfondez pas sur votre malheur, ceci n’est pas un vrai regret, si vous souhaitez vous repentir pleinement, pensez à l’enfant ! A son malheur, à sa détresse, ce que lui a vécu…’’

Il est temps d’arrêter de penser aux bien des ‘’institutions’’, à la renommé des ‘’familles’’ ou de notre cercle (Il ne s’agit pas de les détruire non plus bien sur… mais) Il est temps de se focaliser sur la douleur des victimes, des enfants ! NE FAUTEZ PAS SUR L’ENFANT !

Une enseignante nous confiait : “ça ne sert à rien d’en parler, ça ne crée que plus de frustration, quand on veut agir on nous fait taire. Par crainte des services sociaux, par peur d’être responsable de “détruire” une famille, on nous demande de ne pas parler…”

Qui jouit de ces craintes et de nos problèmes de conscience ?

Les agresseurs !

La méthode visant à tout cacher sous le tapis doit cesser, car les victimes se terrant dans le silence n’en guérissent pas, et ce, même des années après.

Notre silence TUE.

En tant que parents, éducateurs ou responsables communautaires, notre seul devoir est de protéger les enfants. Nous devons nous former à détecter les comportements d’enfants abusés, nous former à les aider à parler, à se confier et avoir la bonne réaction.

Les enfants doivent savoir que personne, ni un grand frère, ni un oncle, ni un père, ni un grand Rav ni Le Roch Yechiva peu importe son emprise ou son statut, personne n’a le droit de les toucher, et si D.ieu nous en préserve il l’a fait et que vous vous êtes laissé faire, CE N’EST PAS DE VOTRE FAUTE ! PARLEZ, NOUS NE VOUS JUGERONS PAS, NOUS SERONS LÀ POUR VOUS AIDER. 

Les tabous sur ces sujets sont un danger pour nos enfants. Ne les laissons pas se terrer dans un silence destructeur pour eux et dangereux pour les autres enfants.