Les cérémonies consacrées à la mémoire de la Shoah, sous quelque forme que ce soit, ont été nombreuses cette semaine malgré la situation difficile. Il est clair que cette mémoire doit être préservée, en particulier en notre temps si vite et si facilement oublieux. C’est l’occasion de revenir sur des notions importantes, parfois peu exprimées aujourd’hui : comment faut-il regarder la Shoah ? Quel sens, à notre niveau et en notre temps, prend notre vie après cette épreuve ?

En premier lieu, il est nécessaire de repréciser que, pour la pensée juive depuis toujours, comme cela apparaît dans le Talmud, chez Maïmonide ou dans les textes ‘hassidiques, D.ieu est bon dans son Essence. Il est même le Bien absolu. Son attitude envers son peuple est, par nature, celle d’un père aimant. Il est clair que, dans une telle vision, on ne peut L’imaginer comme un Créateur cruel qui attendrait que les fautes commises s’accumulent afin que, une fois la mesure pleine, Il puisse enfin châtier ses créatures. Cette idée ne saurait entraîner une quelconque négligence dans la pratique du judaïsme car notre attachement à D.ieu est d’abord ce lien puissant de l’amour, sans doute encore plus exigeant que celui d’une crainte mal comprise.

En second lieu, les Juifs qui ont été assassinés pendant la Shoah ont tous, sans aucune exception, le statut de morts « al kidouch Hachem – pour la sanctification de D.ieu ». Nos textes décrivent la grandeur de ceux qui ont traversé une telle épreuve. Bien sûr, il ne s’agit pas de rechercher le martyre, la vie est sans prix. Cependant, celui à qui cela est arrivé est à un niveau spirituel où, quelque faute qu’il ait pu commettre, il est considéré comme un Tsadik, un juste. Cette définition s’applique à tous nos frères massacrés dans cette terrible période. Les deux points soulevés conduisent à dire que voir la Shoah comme une punition et rien d’autre est, en soi, une grave faute de réflexion.

Pourtant, si tout cela est exact, comment expliquer que de tels événements soient arrivés ? C’est là l’interrogation de Moïse quand D.ieu lui fit voir, avant qu’il quitte ce monde, la mort dans d’horribles supplices de Rabbi Akiba. Il s’exclama : « C’est là la Torah et c’est là sa récompense ? » A ce moment, D.ieu ne lui répondit pas. Il en est de même pour nous. Nous devons poser la question : pourquoi, comment as-Tu permis tout cela ? Peut-être n’aurons-nous pas de réponse mais notre question doit retentir jusqu’au plus haut du Ciel. Elle brisera toutes les barrières et peut-être sera-t-elle la clé qui ouvrira enfin la porte à Machia’h et au temps où toute question n’aura plus lieu d’être.