Décidément, les Juifs sont un peuple étrange. L’actualité étale sa fébrilité partout dans le monde. Les hommes et les états s’affrontent sur fond de pandémie mondiale. Pourtant, tout l’horizon de notre conscience est aujourd’hui illuminé par la perspective de Souccot. De fait, il s’agit là du « temps de notre joie », selon la dénomination liturgique. Et il faut souligner que des idées-forces du judaïsme s’y retrouvent : la confiance en D.ieu tout d’abord (car la Soucca n’est qu’une cabane fragile et seule la protection Divine nous rassure), et aussi l’unité profonde qui nous relie tous (« tous les Juifs peuvent demeurer dans une Soucca unique » disent nos Sages).
Cette année pourtant, comme toutes les fêtes précédentes, Souccot semble devoir se dérouler dans une étrange atmosphère. Masques obligatoires, distanciation indispensable, tout conduit à renvoyer chacun à soi par défaut de contact social. Tout pousse à favoriser une manière nouvelle d’individualisme assumé au nom d’un souci sanitaire bien réel. Evidemment, nous souhaitons tous que tout risque disparaisse le plus rapidement et le plus complètement possible mais, dans cette attente même impatiente, comment vivre la joie si particulière de la fête. Y a-t-il un Souccot derrière le masque ?
Il faut répondre haut et clair par l’affirmative à cette interrogation. Aussi légitime soit-elle, elle méconnaît la force du peuple juif qui lui a permis de traverser toute les épreuves en se souvenant toujours et en ne renonçant à rien. Si la joie ne peut pas s’exprimer avec autant d’éclat qu’à l’accoutumée, c’est signe qu’elle doit être encore plus grande dans notre cœur, au point de se partager subtilement avec tous. Souccot est plus difficile à ressentir ? A nous de le construire !